mutilations génitales féminines en Gambie depuis 2015 est menacée. Les modifications proposées au Parlement pourraient autoriser l'excision médicalisée et l'autoriser pour les adultes consentants.

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Gambie

Par Satang Nabaneh, publié le 2024-05-28 06:01:43

La Gambie pourrait autoriser à nouveau les mutilations génitales féminines : un nouveau signe d'une tendance mondiale à l'érosion des droits des femmes.

L'interdiction des mutilations génitales féminines en Gambie depuis 2015 est menacée. Les modifications proposées au Parlement pourraient autoriser l'excision médicalisée et l'autoriser pour les adultes consentants.


Satang Nabaneh, University of Dayton

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Ce possible revirement a propulsé le pays aux devants de l'actualité internationale comme le dernier exemple en date du retour en arrière sur l'égalité des sexes.

La criminalisation des mutilations génitales féminines en Gambie n'est pas une première en Afrique de l'Ouest, même si elle était quelque peu inattendue. L'ancien président, Yahya Jammeh, avait déclaré que cette tradition culturelle endémique était une pratique non religieuse et nuisible. Il y a eu quelques dissensions dans le pays, mais les groupes de défense des droits de l'homme avaient salué son interdiction.

Jammeh, qui a été président de 1994 à 2016, a également joué un rôle déterminant dans l'adoption d'autres lois progressistes relatives au genre. La loi de 2013 sur la violence domestique a établi un cadre pour la lutte contre la violence domestique sous toutes ses formes (physique, sexuelle, émotionnelle, économique) et la protection en particulier des femmes et des enfants. La loi de 2013 sur les infractions sexuelles a élargi la définition du viol, les circonstances dans lesquelles les individus peuvent être inculpés et allégé la charge de la preuve lors des poursuites.

Jammeh a également interdit les mariages d'enfants en 2016. Cette mesure est importante dans un pays où un jeune sur cinq âgé de 15 à 19 ans (19 %) est marié.

Dans l'un des pays les plus dépendants de l'aide au monde, ces réformes étaient toutes au cœur des intérêts des donateurs internationaux. Elles ont contribué à améliorer la réputation démocratique du pays. Mais en même temps, elles ont permis au dirigeant autocratique de s'en tirer avec d'autres excès. Il a également mobilisé la religion pour manipuler les croyances et les sentiments, ce qui a particulièrement affecté les filles et les femmes. Par exemple, Jammeh a imposé le port du voile ou du foulard aux employées du gouvernement lorsqu'il a déclaré son pays à majorité musulmane État islamique en 2016.

Le président Adama Barrow, successeur de Jammeh, a mis l'accent sur la tolérance religieuse et s'est abstenu de recourir au symbolisme religieux. Contrairement au soutien du régime de Jammeh à l'homophobie, Barrow a minimisé l'homosexualité en la qualifiant de “non problématique”.

Je suis juriste et praticienne des droits de l'homme et j'ai publié des recherches sur les mutilations génitales féminines, l'égalité des sexes et les droits des femmes et la gouvernance en Gambie. Je pense que le respect apparent des normes d'égalité des sexes par Jammeh était sélectif et destiné à impressionner davantage la communauté internationale, plutôt qu'un véritable engagement en faveur des droits des femmes et de la démocratie.

Sa posture tactique met en lumière une tendance plus générale. Les dirigeants africains autocrates s'accommodent souvent des normes mondiales en matière d'égalité des sexes afin de préserver les dynamiques de se maintenir au pouvoir. Il en résulte, par exemple, une participation accrue des femmes à la vie politique par le biais de quotas ainsi qu'une approche conservatrice de la santé et des droits sexuels et reproductifs.

L'expérience de la Gambie montre également que les donateurs occidentaux et les institutions multilatérales ne doivent pas se contenter d'encourager les réformes. Une fois qu'ils ont obtenu les réformes qu'ils préconisaient, ils doivent avoir une stratégie pour les préserver. Les forces qui étaient opposées à la réforme se regroupent souvent pour faire campagne en faveur de sa suppression.

Au fond, les mutilations génitales féminines constituent une violation des droits des filles et des femmes. Il s'agit notamment du droit à la non-discrimination, à la protection contre la violence physique et mentale, à la santé et à la vie.

D'un point de vue féministe, la prévalence des mutilations génitales féminines dans de nombreux pays africains est liée au maintien de normes sexospécifiques et au contrôle de la sexualité des femmes.

Les mutilations génitales féminines en Gambie

La mutilation génitale féminine est une pratique profondément enracinée. Elle est motivée par des croyances culturelles et souvent pratiquée par des guérisseurs traditionnels. Selon l'enquête nationale la plus récente, une grande majorité des femmes gambiennes âgées de 15 à 49 ans (73 %) ont subi une mutilation génitale féminine. Plus alarmant encore, on observe une hausse de 8 % de la prévalence des MGF chez les filles de moins de 14 ans - de 42,4 % en 2010 à 50,6 % en 2018.

De nombreux risques pour la santé associés à tous les types de pratiques ont été documentés par l’Organisation mondiale de la santé et des revues systématiques. Il s'agit notamment de douleurs intenses, de saignements, d'infections et de complications pendant l'accouchement, ainsi que de taux élevés d'anxiété et d'autres troubles mentaux. Cela a conduit à des appels pour que cette pratique soit interdite afin de protéger la santé et le bien-être des filles.

La Gambie fait face actuellement à un défi complexe concernant l'interdiction de l'excision, mettant en jeu un équilibre délicat entre normes culturelles, croyances religieuses et quête d'égalité des sexes.

L'abrogation potentielle de cette interdiction constitue une menace pour les droits des femmes et des filles en Gambie.

Revenir sur des avancées durement acquises

Bien que la Gambie soit constitutionnellement laïque, la religion influence presque tous les aspects de la société. Les fondamentalistes islamiques du pays sont connus pour leurs attaques contre les minorités religieuses, notamment par des discours de haine contre la communauté musulmane Ahmadiyya et la communauté chrétienne.

Les principaux acteurs religieux fondamentalistes s'inspirent de l'ancien dictateur en exil Jammeh et le soutiennent toujours. Ils sont en première ligne de la récente riposte contre la loi anti-MGF. Ils affirment que l'interdiction viole leurs libertés religieuses et culturelles garanties par la Constitution de 1997.

Le 4 mars 2024, un fervent partisan de Jammeh a proposé un projet de loi à l'Assemblée nationale qui vise à annuler l'interdiction.

La resurgence des rôles traditionnels des hommes et des femmes n'est pas spécifique à la Gambie. Elle s'inscrit dans une tendance mondiale à faire reculer les progrès en matière d'égalité des sexes. Cette tendance se caractérise par des tentatives de limiter les choix qui portent sur le corps des femmes, une augmentation des acetes de violence à leur encontre, ainsi que des attaques contre les communautés LGBTQI+. Elle reflète un climat politique plus général de rejet des droits de la femme et de l'égalité entre les sexes, qui sont considérés comme une arme pour revenir sur les acquis démocratiques.

On a constaté des tentatives pour annuler les protections juridiques des femmes et des filles au Kenya. Au Soudan, la violence sanctionnée par l'État et la pression sociétale visent à restreindre la participation des femmes à la vie publique. De même, la Tanzanie a adopté une politique interdisant aux mères adolescentes de fréquenter les écoles publiques, mais cette politique a été annulée.

Ce contexte mondial met en évidence la façon dont les mouvements anti-droits, les normes non démocratiques et les politiques sexospécifiques travaillent ensemble pour affaiblir les droits des femmes et exacerber les inégalités.The Conversation

Satang Nabaneh, Director of Programs, Human Rights Center; Research Professor of Law, University of Dayton School of Law, University of Dayton

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.